Mesurer et favoriser le progrès des sociétés

Publié le par Jean LAMBRET

Après les critiques du PIB, qui ne sont pas récentes, le succès de l’IDH, inspiré des travaux d’Amartia SEN, l’OCDE mène la réflexion internationale « Mesurer et favoriser le progrès des sociétés ». Cette réflexion semble motivée par une perception décalée, depuis les années 80, entre croissance (PIB = productivisme, techniciste, occidentaliste, sexiste) et progression du bien-être (santé sociale, satisfaction, progrès véritable, favoriser l’être sur l’avoir). Mais le bonheur est subjectif, normatif. La NEUROECONOMIE, fondée sur la mesure directe des sentiments propres à chacun est cité, malgré l'abération de son utilisation.

 

Le PIB tient sa force de l’unité de compte, la monnaie. Pigou, l’un des premiers économistes, en 1920, relève que l’utilité marginale d’un même montant est supérieur pour les moins riches. La non prise en compte des facteurs de répartition biaise l’approximation rendue par le PIB. Il ne mesure que la richesse produite, hors externalité et activités non marchandes. De plus, des flux négatifs ne sont pas décomptés (dépollution, prévention, traitements des maladies professionnelles). Des corrections peuvent être apportées en décomptant certaines dépenses dont l’utilité finale n’est pas arrêtée (publicité, services juridiques), en monétarisant certaines grandeurs non-marchandes (loisirs, autoproduction, travail informel) et en déduisant les coûts de dégradation du patrimoine, en ajoutant au PIB des indicateurs d’inégalités et des mesures des ressources et opportunités réelles des individus : les capabilités (éducation-formation, santé, capital social).

 

Les nombreuses recherches ramènent à la nécessité de fixer une norme. Osberg et Sharpe en 1983,  s’appuient sur la déclaration universelle des droits de l’Homme des nations Unies (A 25 « toute personne a droit à un niveau de vie suffisant et à la sécurité économique »). Mais la norme reste en grande partie subjective : faut-il s’appuyer sur les opinions, qui permettent la mesure de la satisfaction, ou bien utiliser les neurosciences pour collecter directement des mesures de l’activité cérébrale (IRM…) ? Dans ce cas, il faudrait mieux, relève John Stuart Mill être un « pourceau satisfait » plutôt qu’un « Socrate insatisfait ».

 

La question du point de vue collectif est de garantir une organisation qui favorise la poursuite du bonheur plutôt que l’accès à un droit au bonheur. La théorie des capabilités, développée par Armatia SEN, relayée par un grand nbre d’acteurs institutionnels (OCDE, Commission Européenne, PNUD…). Reste à élaborer des « indicateurs de capacité d’action » en lien avec les mesures d’inégalité. Le développement humain serait alors un processus d’élargissement des choix des personnes, l’atteinte du vrai bonheur restant réservé à l’intimité de chacun.

(Extrait de la Note de Veille n°91 CAS)

Publié dans Sociologie

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